Fédération de l'Hérault

Fédération de l'Hérault
Accueil
 
 
 
 

Rencontre de l'ANECR sur l'acte trois de la décentralisation : le discours introductif de Jean-Jacques Paris.

Jusqu’à une période encore récente et que l’on peut situer aux alentours de 2005 les français soutenaient massivement non seulement l’idée de décentralisation mais aussi son approfondissement. Certes nul ne peut nier les effets positifs en matière de gestion des équipements, des transports et des infrastructures notamment.

Cependant les nombreux travers, les dérives constatées, l’insuffisance des moyens accompagnant le transfert des missions et des personnels, mais aussi la confiscation des pouvoirs par un petit nombre de décideurs ont progressivement freiné l’appétit pour une nouvelle étape. De plus avec l’aggravation durable de la crise, ses effets sociaux destructeurs, les politiques austéritaires et récessives qui l’accompagnent, nombreux sont les citoyens qui aujourd’hui réclament un retour de l’Etat qui puisse les protéger face aux agressions qu’ils subissent et à l’insécurité sociale qu’ils vivent. Il nous faut donc beaucoup mieux articuler la démocratie locale, le rôle et la place des collectivités locales, leur libre administration, et le rôle de l’Etat central qui doit garantir l’égalité de traitement des citoyens dans la République, la solidarité et les grands équilibres.

Décentraliser et réformer l’Etat en le démocratisant sont deux nécessités indissociables et indispensables.

Une trentaine d’année après les premières lois de décentralisation, il faut bien reconnaître que notre pays est encore très loin de répondre à cette exigence démocratique qui dans l’entreprise comme dans la cité ouvrirait à tous les citoyens de nouvelles possibilités d’intervention pour co-élaborer et promouvoir des solutions leur permettant de maitriser les grands enjeux de société comme l’organisation de la vie collective.

C’est clair, pour travailler à ce bond en avant de la démocratie que nous appelons de nos vœux, nous sommes en toutes occasions disponibles.

Alors que tout l’appareil institutionnel tend à personnaliser le pouvoir et à le concentrer entre quelques mains, nous voulons œuvrer à partager les pouvoirs et à construire une réelle souveraineté populaire qui s’appuie sur l’exigence de participation des citoyens aux décisions.

N’en déplaise à tous nos détracteurs, idéologues et experts largement médiatisés et qui déploient tous les mêmes représentations des pouvoirs de décision, qui parlent le même langage de la compétition entre territoires et de l’attractivité, les élus communistes et républicains sont aux côtés de celles et ceux qui veulent le changement, qui agissent pour changer le cours des choses.

Ni statut quo qui serait mortifère pour la république, ni retour en arrière laissant penser que tout pourrait s’administrer à partir de l’Etat central écartant de fait le citoyen de la gestion des affaires publiques.

On le voit bien l’idée de décentralisation et ce n’est pas d’aujourd’hui, ses finalités, ses modalités, sont forcément l’objet d’affrontements politiques de grande ampleur.

D’une part une énorme pression libérale s’exerce dans le sens d’un démantèlement des responsabilités publiques nationales et l’objectif est alors de réduire l’Etat au minimum en transférant une gestion locale aux collectivités territoriales pour qu’elles en assument les coûts et les responsabilités devant le peuple pendant que l’union européenne se charge de leur faire respecter la loi généralisée de la concurrence. La volonté assumée par le gouvernement de réduire toujours plus la dépense publique et les dotations aux collectivités locales va bien dans ce sens. L’étouffement financier des collectivités les pousse à réduire l’emploi public et à abandonner des missions à la sphère marchande.

Par ailleurs, s’appuyant sur les peurs et les craintes et au nom de l’unité républicaine, les dérives conservatrices s’opposent à toute démocratisation de l’Etat.

Les élus communistes et républicains défendent depuis de nombreuses années une autre conception de la décentralisation qui articule le droit des citoyens à gérer leurs propres affaires et le développement à tous les niveaux et particulièrement au niveau national de toutes les formes de solidarité.

Dans cette approche, la commune, lieu de proximité où peuvent s’exercer tout à la fois démocratie et solidarité et où foisonnent les aspirations croissantes à voir se nouer des coopérations utiles et efficaces permettant de donner naissance à de nouvelles relations locales entre citoyens, la commune demeure incontournable, et c’est bien là que le bât blesse.

En effet, forts de leurs expériences, et traduisant en cela une expression culturelle forte, de très nombreux élus de diverses sensibilités ne sont pas loin de partager cette vision, refusant du même coup toutes les tentatives autoritaires de fusion, de regroupement conduisant à effacer les communes et du même coup les départements.

Il n’est pas étonnant alors que la loi Sarkozy ait à ce point susciter l’irritation de nombreux élus locaux.

S’appuyant sur le rapport Balladur dont les propositions pouvaient se résumer ainsi : généraliser l’interco à marche forcée, regrouper les régions et les départements avec le conseiller territorial, instituer des métropoles et les communes nouvelles, supprimer la taxe professionnelle.

Ainsi apparaissent clairement deux objectifs, la rationalisation extrême et la réduction de la dépense publique, résumés ainsi par Dominique Perben « un nombre excessif de structures territoriales aux compétences mal définies fragilisent la situation de nos finances publiques et la compétitivité de notre économie. »

Cette logique heurtait de plein fouet l’attachement à l’exercice du pouvoir local et à la liberté d’administration, dimension forte de la démocratie locale, ce qui précipitait le basculement du sénat. Pas étonnant que lors des états généraux au Sénat tant de voix se soient élevées pour exiger une autre direction, s’appuyant sur une réelle concertation.

Face à ce mouvement de fond nous étions en droit d’attendre l’abrogation de la loi de décembre 2010 mais aussi une mise à plat des effets de la décentralisation à ce jour et la construction avec tous les acteurs, d’un projet plus en phase avec le besoin de démocratie et de maitrise publique.

En reconduisant bon nombre d’objectifs de la loi Sarkozy dans son avant projet avec un volontarisme remarqué le gouvernement suscite de nombreuses secousses dans les territoires, des rassemblements s’opèrent au-delà des clivages mêmes, qui laissent à penser que rien n’est réglé et que tout reste encore possible. Le gouvernement devrait ouvrir grand ses oreilles, bien écouter ce qui se trame dans les multiples réunions et initiatives qui continuent de se tenir sur le terrain, et ne pas se contenter de retenir l’avis de quelques élites politiques plus attachées à leur situation personnelle qu’à l’intérêt général.

En organisant cette journée ouverte à divers acteurs l’ANECR poursuit son implication ininterrompue depuis le discours de N. Sarkozy annonçant sa réforme en 2009, forte de l’engagement résolu des élus communistes et républicains à tous les niveaux.

Une journée tout à la fois de témoignages, de réflexions, et de résolutions pour porter plus loin et plus fort l’exigence d’une démocratisation d’un secteur public puissant pour répondre aux grandes aspirations à l’égalité, la solidarité, au progrès social.

Face aux puissances financières et à leur relais politique nous voulons contribuer à un essor démocratique sans précédent qui puisse ouvrir de nouveaux possibles permettant au peuple de reprendre la main.

Préfigurant la construction d’une action nationale d’envergure, qui traduirait les multiples convergences entre élus, syndicalistes, militants associatifs et citoyens, cette journée doit être un tremplin qui donne une nouvelle impulsion à tous les niveaux, qui libère des initiatives tournées vers les citoyens avec d’autres acteurs et partenaires attachés à sortir les collectivités et leurs service publics du carcan dans lequel elles se trouvent.

Vos témoignages, vos interventions, vos expériences, vos luttes, leur précision, leur aspect concret, leur dynamisme, leur contenu unitaire et rassembleur sont de nature à changer la donne pour le plus grand bien de la démocratie et des citoyens qui se demandent qui va bien pouvoir les entendre.

Je ne peux terminer cette invitation à un large débat et pour agir ensemble sans évoquer le fait que la France a ratifié la charte européenne de l’autonomie locale en 2006 faisant d’elle une République décentralisée. Cette charte consolide et garantit l’autonomie locale des collectivités territoriales dont la taille et les ressources permettent l’exécution indépendante d’une partie importante des affaires publiques. J’y vois pour ma part une incitation forte à des regroupements laissant entrevoir un alignement du pouvoir local sur les standards européens.

Il y a actuellement 0 réactions

Vous devez vous identifier ou créer un compte pour écrire des commentaires.

 

Rencontre de l'ANECR sur l'acte trois de la décentralisation : le discours introductif de Jean-Jacques Paris.

le 21 février 2013

A voir aussi