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La lettre du Réseau école - Juillet 2013 : les pièges de la « priorité à l’école ».

 
 

c’était une promesse du candidat Hollande, c’est maintenant un slogan du gouvernement : il faut donner la priorité à l’éducation. on ne peut qu’être d’accord : oui, en temps de crise, dépenser pour l’éducation, c’est investir dans l’avenir. oui, dans une société où les savoirs jouent un rôle de plus en plus important, le développement de l’éducation est essentiel pour permettre aux futurs travailleurs et aux futurs citoyens d’être maîtres de leur destin. oui, alors que l’école est en crise et que les inégalités s’aggravent, il est urgent d’agir sur le système éducatif. mais la « priorité à l’éducation » ne doit pas, ne peut pas être le prétexte au démantèlement des autres services publics ! L’école ne pourra pas assurer la réussite de tous si par ailleurs l’accès aux transports, à la culture, à la santé sont réservés à quelques-uns. assurer à l’école le maintien de moyens encore insuffisants au prix du saccage des autres services publics, est-ce cela que l’on appelle donner « la priorité à l’éducation » ? Le développement d’une éducation capable de répondre aux défis de l’avenir est incompatible avec l’austérité.

si l’on pense que les citoyens et les travailleurs de demain devront maîtriser des savoirs plus complexes, alors il ne suffit pas de réformer les rythmes scolaires : il faut leur offrir à tous une scolarité obligatoire plus longue, jusqu’à 18 ans, et penser autrement l’organisation des temps de la vie. cela impliquerait d’en finir avec l’équation simpliste qui associe allongement de l’espérance de vie et recul de l’âge de la retraite. certes, nous vivons plus longtemps (mais pour combien de temps encore, et pour quelle part de la population ?). mais nous avons besoin aussi de nous former plus longtemps. scolarité obligatoire jusqu’à 18 ans, statut de travailleur en formation pour les étudiants, éducation tout au long de la vie au sein d’une sécurité d’emploi et de formation, retraite à 60 ans… un projet pour l’école, c’est un projet pour la société !

La « priorité à l’éducation » en est bien loin. Quels moyens nouveaux le gouvernement donnet-il à l’école, qui justifieraient les coupes sombres opérées ailleurs ? dès la rentrée prochaine, le ministre Peillon promet 10 000 emplois aidés dans les collèges et les lycées. mais dans le même temps, les crédits consacrés aux aides sociales aux élèves et à leur famille sont rabotés et de nombreux postes d’assistants d’éducation (aed) sont supprimés. on remplace ainsi près de 2000 équivalents temps plein dépendant du ministère de l’éducation par des « emplois d’avenir » dont le statut est nettement moins bon, qui dépendront du ministère du Travail, et dont on ne sait pas ce qu’ils représenteront en équivalent temps plein. Le cadeau n’est pas si beau qu’il en a l’air… et l’on est de toute façon bien loin de répondre aux besoins réels. Quant aux 60 000 postes promis (alors que la droite en avait supprimé 80 000, le compte n’y est pas), ils sont loin d’être créés ! s’ils sont mentionnés en annexe de la loi Peillon, rien ne garantit encore qu’ils figureront bien dans les lois de finance successives. La vigilance est de mise. Les financiers réclament toujours plus d’austérité : comment croire que l’école sera longtemps à l’abri ?

économies de bout de chandelles et bricolages financiers… pour quoi faire ? Là encore, l’ambition n’est pas au rendez-vous. on parlait de refondation. Finalement, il s’agit surtout de faire fonctionner, cahin caha, une école toujours plus ségrégative. L’école a besoin de moyens nouveaux, mais les moyens ne font pas tout : ils doivent être mis au service d’un projet en rupture avec les logiques libérales : le projet d’une école de l’égalité, transmettant à tous les élèves, sur tout le territoire, une culture commune de qualité. « Priorité à l’école », oui, mais pas à l’école de la ségrégation ! Il ne suffit pas de préserver quelques moyens pour fonder l’école de la réussite de tous. certes, les moyens sont essentiels. mais il faut former les enseignants pour leur permettre de maîtriser leur métier, il faut repenser les programmes sur le modèle de l’élève qui n’a que l’école pour apprendre, il faut assurer la réelle gratuité de l’enseignement, il faut garantir qu’une même formation soit reconnue par une qualification égale. c’est cette école, capable de faire réussir tous les élèves, que nous voulons construire. et pour ce faire, il faudra en finir avec les « priorités » qui mettent en concurrence les services publics entre eux : au contraire, seul un développement concerté de l’ensemble des services publics nous permettra d’être à la hauteur des défis de l’avenir.

Marine Roussillon,
animatrice du réseau école

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